Entre le monde et l'écran
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lundi, avril 30, 2007

Les visages de la misère

À Montréal, j'observe une chose que je vois très rarement en Beauce, parce que c'est plus rare ou parce que c'est moins apparent : la misère. Par contre, au Mali, j'en ai vu beaucoup, de la misère. Mais là-bas, elle a un visage différent. À Montréal, ce sont des jeunes que j'ai vus, samedi soir, installer une bâche à la sortie d'une station de métro, en vue de la nuit fraîche à venir. C'est un homme dans la force de l'âge (40 ans tout au plus) qui me demande chaque jour un peu de monnaie à la sortie de l'épicerie. C'est un homme dans la vingtaine qui m'a demandé, tout-à-l'heure, en joignant les mains, "un peu de monnaie mademoiselle ?" Derrière la misère montréalaise, j'imagine normalement des histoires de mésentente familiale, des histoires d'alcoolisme, de toxicomanie, parfois des maladies mentales...

Au Mali, il y a sans doute également des histoires de maladies mentales qui se cachent derrière ces quelques fous qu'on voit se promener en ville dans des vêtements usés à la corde... quand vêtements il y a ! Des fesses de fous, j'en ai vues !... Mais les gens qui mendient au centre-ville de Bamako sont généralement des handicapés physiques, des personnes dont le corps ne leur permet pas d'exercer un métier, des personnes dont la famille, sans doute, n'a pas les revenus nécessaires pour leur éviter la honte de la mendicité. J'ai vu parfois aussi des mères mendier, souvent accompagnées de leurs jeunes enfants... Des femmes peut-être abandonnées par leur mari, ou leur famille, sans ressource... Dans la rue, il y a aussi les petits talibés qui mendient, ces jeunes garçons, élèves d'écoles coraniques, qui récoltent argent ou nourriture, une boîte de conserve à la main, en chantant des chants musulmans...

Si moi je suis surprise par les différents visages que porte la misère, selon qu'on se trouve à Bamako ou à Montréal, les Maliens, eux, ont toujours été étonnés de m'entendre dire que "Oui, il y a de la misère en Amérique du Nord, oui, il y a des itinérants dans les rues des grandes villes nord-américaines, même qu'ils sont en grand nombre, été comme hiver." Pour un Malien, qui vit dans l'un des pays les plus pauvres du monde, il est inconcevable qu'il y ait des itinérants, des mendiants, dans l'un des pays les plus riches de la planète. Et franchement, j'ai toujours eu beaucoup de difficultés à expliquer aux Maliens de mon entourage comment le Canada arrive à produire autant de mendiants. Sinon en disant que, peut-être, la misère n'est pas tant une question de pauvreté qu'une question d'organisation sociale... Mais ça demeure une réponse bien abstraite pour un Malien pour qui le Canada représente l'eldorado...

samedi, avril 28, 2007

Des chansons religieuses... de Bamako à Montréal

Dans la station de métro où je m'arrête, en revenant du boulot, il y a souvent une vieille femme, rabougrie, qui tient à peine debout, qui chante des chants religieux. Bien que son accoutrement fasse craindre le pire (elle porte un vieux jean, de vieux espadrilles, elle est à peine coiffée, et son regard est un peu vide), sa voix est belle et, surtout, très touchante. Elle me rappelle les élèves des écoles coraniques, au Mali, qu'on appelle les talibés. Ces jeunes garçons, qui vivent nuit et jour avec un marabout, sont forcés de mendier (ça fait partie de leur éducation, semble-t-il), et pour ce faire, ils chantent des chants religieux aux coins de rue, là où s'arrêtent les voitures, les taxis et les sotramas, le temps d'un feu rouge. Ces jeunes garçons ont, pour la plupart, une voix superbe, et surtout, très touchante. Pourtant, comme la vieille femme du métro, leurs vêtements défraîchis, troués, font craindre le pire. Jamais on pourrait imaginer, à première vue, que ces jeunes garçons ont de si belles voix... comme jamais j'aurais pu imaginer qu'une si belle voix pouvait sortir de la bouche de cette femme...

mardi, avril 24, 2007

Où sont les enfants ?

En prenant le métro hier matin pour me rendre au travail, je me suis posé la question : où sont les enfants montréalais ? Au Mali, j'ai été habituée à voir des enfants partout. La plupart des maisons étant multigénérationnelles, des personnes de tous les âges y vivent, du bébé au grand-papa. Ainsi, chaque soir, j'étais accueillie, tantôt par Mariam, 3 ans, et Adama, 5 ans, tantôt par Baba et Ibrahima, 10 ans, etc. Parmi les femmes avec qui je prenais le sotrama tous les matins, nombreuses étaient celles qui portaient sur leur dos le petit dernier. Et il m'était assez fréquent d'être accueillie au dépanneur ou au cybercafé par une femme en train de nourrir son bébé, ou de consoler son enfant.

Mais en prenant le métro, je n'ai vu qu'un petit garçon, un petit roux aux cheveux bouclés, qui accompagnait sa maman. Un seul enfant pour un trajet de près d'une heure... Oui, d'accord, même au Mali, les femmes qui travaillent dans des bureaux n'emmènent pas leur progéniture avec elles au travail. Ainsi, à Montréal, à l'heure où j'ai pris le métro, probablement que plusieurs rejetons avaient été déposés, déjà, à la garderie. Et puis il est possible également qu'à Montréal, on tolérerait un peu moins d'attendre 10 minutes pour payer sa boîte de lait, le temps que la maman termine de nourrir son petit. On tolérerait peut-être moins aussi d'entendre un bébé chialer pendant qu'on navigue sur Internet dans un cyber. Quand même, est-il normal que, du matin au soir, je ne vois jamais aucun enfant, sinon quelques rares bébés bien cachés au fond d'un pousse-pousse ? Est-ce parce que j'habite au centre-ville, alors que les parents préfèrent s'installer en banlieue ? Est-ce parce que les parents préfèrent la voiture aux transports en commun ?

En tous cas, je suis bien mal placée pour juger du mode de vie des parents montréalais. Mais ce que je peux dire, c'est que l'absence presque totale d'enfants dans les rues de Montréal, du moins dans son centre-ville, crée une atmosphère complètement différente de celle à laquelle j'étais habituée au Mali. J'admets que, parfois, quand je voyais les enfants du quartier Lafiabougou, à Bamako, courir chez moi alors que je n'avais pas encore déposé mes sacs après une longue et fatiguante journée de travail, ça m'exaspérait... parfois... Mais maintenant, oui, je l'avoue, ça me manque drôlement !

lundi, avril 23, 2007

Mourial

Depuis hier, je suis à Montréal. Je commence à travailler demain pour l'Office national du film. C'est la première fois de ma vie que j'habite cette ville, et comme j'ai eu certains chocs à Bamako, Montréal sait aussi me surprendre. Première surprise en attendant le bus ce matin : quand le bus est enfin arrivé, tous ceux qui l'attendaient se sont naturellement mis en file, sans se bousculer. C'était tellement discipliné et ordonné que je n'ai même pas osé m'insérer entre deux personnes. Je me préparais à marcher jusqu'au bout de la file, complètement éberluée, quand une femme m'a fait signe en souriant de passer devant elle. J'ai pas souvent pris le bus à Québec, mais je pense que même là-bas, les gens sont moins disciplinés. En tous cas, c'était tout un constrate avec ce à quoi j'étais habituée, à Bamako ! Là, les gens se ruent littéralement sur le sotrama (l'équivalent de nos bus), surtout quand ils attendent depuis longtemps et que le sotrama semble plutôt plein. On se fout bien qu'une personne soit là depuis plus de 30 minutes, c'est à qui sera le plus rapide !

Une fois assise dans le bus, les illustrations qui incitent les gens à céder leur place aux personnes âgées, femmes enceintes, etc. m'ont rappelée une étrange situation observée à Bamako. J'ai vu une fois une femme, à la fois handicapée physique et mentale (il m'a semblé en tous cas), entrer de peine et de misère dans un sotrama presque plein. Elle avait du mal à marcher, et comme il y avait peu de place pour s'asseoir, elle s'est retrouvée sur les genoux d'un des passagers. Plutôt que d'être conciliant et de se pousser un peu pour lui faire de la place, il l'a forcée à s'asseoir par terre. Non contents de la voir assise par terre, les autres passagers ont exigé qu'on la fasse sortir du sotrama ! Tout le monde parlait en même temps, et au bout du compte, la femme handicapée est ressortie du sotrama, en tombant presque, à moitié poussée par les passagers. Elle s'est retrouvée assise sur le bord de la route puis le sotrama est reparti, sans elle. Cette situation était d'autant plus bizarre pour moi qu'après cette petite aventure, tous les passagers ont beaucoup rigolé ! J'ai été vraiment choquée par ce comportement, je dois l'avouer !

Il s'agit d'ailleurs d'une attitude que je trouve très étrange et que j'ai souvent observée au Mali. Quand un malheur survient, quand les gens aperçoivent une personne qui souffre, ils ont tendance à rire. Une fois, complètement secouée après avoir vu un homme se faire franchement mal après être tombé de sa moto en marche, j'ai été encore plus secouée de voir le chauffeur de taxi à côté de moi éclater de rire ! Vraiment, c'est un comportement que je n'arrive pas du tout à comprendre et qui est, en tous cas, très différent du comportement occidental dans de telles situations...

jeudi, avril 19, 2007

Tombouctou

Au Mali, peu importe le moyen de transport utilisé, c'est toujours un peu chaotique ! ...



Outre ce vidéo, on peut voir les photos que j'ai prises lors de mon séjour à Tombouctou à cette adresse. J'ai été fascinée par Tombouctou, le paysage, le sable partout, le style médiéval de la ville, la présence d'une culture tout-à-fait différente de celle rencontrée à Bamako, avec la présence de Songhaïs et de Touaregs notamment, la quasi absence de voitures et de motos... En même temps, à cause de mon séjour trop court probablement, je me suis vraiment sentie comme une touriste (ce que j'étais bien sûr), mais du tourisme à la limite du voyeurisme. C'est particulièrement vrai quand je suis allée passer une nuit dans une famille de Touaregs. Surtout, je me suis sentie coupable de ne pas avoir connu davantage leur culture avant d'aller les visiter. Ça ne m'a donné qu'un avant-goût et depuis mon retour, j'ai l'envie pressante d'en savoir plus sur les peuples nomades et les peuples du désert...

Sinon, mon retour de Tombouctou jusqu'à Bamako a été pénible, je dois le dire, comme tout voyage sur les routes maliennes ! J'ai quitté la maison où j'étais logée à 4h, et après avoir rempli le 4x4 d'une onzième personne (c'est fini maintenant, non ?), puis d'une douzième personne (un jeune homme, genre d'apprenti qui a fait le voyage sur le toit !), nous avons attendu plus d'une heure le bac qui permet de traverser le fleuve Niger, à la sortie de Tombouctou. Nous avons donc quitté réellement Tombouctou vers 6h30 seulement. Nous nous sommes arrêtés à plusieurs reprises parce que le 4x4 n'était pas tellement en bon état. Surtout, on s'est fait empoussièrer comme c'est pas possible. À mon arrivée à Douentza, j'avais de la poussière jusque dans mon chandail, profondément au fond des oreilles... bref, j'avais de la poussière partout. Bien que les conditions de voyage ont été difficiles, ç'aurait pu être pire. J'ai vraiment été impressionnée, entre autres, par les 3 personnes âgées, assises derrières, qui plutôt que de se plaindre tout au long de ce voyage chaotique, éclataient de rire chaque fois qu'elles étaient un peu trop secouées. Ces mêmes personnes sont sans doute habituées à la dure, puisqu'elles ont rempli leurs bouteilles d'eau, à même le fleuve, dans cette même eau où certains font pipi, où des moteurs pas du tout récents déversent leurs déchêts...

J'ai été encore plus impressionnée par ces dizaines de personnes que j'ai vu défiler, assises par-dessus les bagages, dans les boîtes de 4x4 surchargés. C'est à se demander comment on peut tenir ainsi sans tomber pendant plus de 6h !

À Douentza, on a voulu me faire monter dans un genre de mini-van pas du tout en état. J'ai dit que non, je ne voulais pas monter là-dedans, que je ne faisais pas confiance au véhicule, et que si je mourais dans un accident, on en entenderait parler jusqu'au Canada... ce à quoi on m'a répondu que si je mourais, c'était la volonté de Dieu ! Cette habitude qu'ont les Maliens de tout faire reposer sur Dieu est vraiment exaspérante, parfois ! J'ai souvent eu envie de leur dire "Pourquoi pas entretenir ta voiture, plutôt que d'espérer que Dieu te sauve la vie ?!"... En fin de compte, j'ai eu de la chance, un car d'une compagnie connue et qui roulait droit sur Bamako est passé par là, et j'ai couru réserver ma place. Le seul hic est que le car est arrivé si vite que j'ai même pas eu le temps de me nettoyer un peu avant de repartir. Il était déjà passé 13h quand j'ai quitté Douentza, et c'est presque 12h plus tard, vers 2h du matin, que je suis enfin arrivée à Bamako ! Le voyage a été pénible, surtout que j'étais tellement sale ! Et puis la fatigue a rendu la chaleur particulièrement difficile à supporter, surtout aux heures les plus chaudes de la journée !Tout au long du voyage, je me suis d'ailleurs encouragée en m'imaginant sous la douche.

Malgré tout, je n'ai pas regretté d'avoir roulé jusqu'à Tombouctou. J'aurais pu me rendre là-bas en avion, mais je tenais à voir le paysage changer à mesure qu'on se dirigeait vers le nord, vers le coeur du désert. Quand même, compte tenu des conditions de voyage dans un pays comme le Mali, j'ai franchement réfléchi à la façon de voyager dans des pays où les conditions routières sont un peu différentes de celles qu'on connaît en Europe ou en Amérique du Nord. Je n'ai jamais eu peur de me taper de très longues distances en voiture, même que j'aime rouler. Mais vraiment, si je devais retourner en Afrique, sans aucun doute je changerais ma façon de voir du pays !

lundi, avril 16, 2007

Ségou

J'ai ajouté à mon compte Flickr les photos que j'ai prises à Ségou. Ségou est une très belle ville, dont les rues sont bordées de grands arbres et de maisons de style coloniale. Par-dessus tout, Ségou est une ville portuaire, et c'est justement dans le port que j'ai passé la majeure partie de mon séjour à Ségou. Pour une rare fois au Mali, j'y ai trouvé le calme et le silence, des denrées rares au Mali. Cependant, bien que j'ai beaucoup aimé me balader dans le port de Ségou, je n'y suis pas restée beaucoup plus longtemps qu'à Sikasso. C'est que j'ai visité Ségou alors que la saison touristique tirait à sa fin (le boom touristique a lieu de décembre à mars, au Mali), et les vendeurs de toutes sortes, piroguiers et guides touristiques se jettaient littéralement sur tout humain à la peau blanche qui avait le malheur de se montrer en public. Ainsi, je suis arrivée à Ségou le vendredi après-midi, et j'ai quitté la ville le samedi midi, totalement écoeurée par toutes ses personnes qui voulaient me vendre tantôt un bijou, tantôt une sculpture, tantôt un tour en pirogue, tantôt une visite de la ville. Ils sont venus me trouver jusque dans le restaurant où je m'étais résignée d'aller, malgré le prix un peu élevé des plats, justement pour bénéficier d'un peu de répit. Ils m'attendaient à la porte de l'hôtel. Il y en a même un qui m'a accompagnée jusqu'à la gare d'autobus, quand je suis partie. Celui-là a payé pour tous les autres, et je lui ai bien fait comprendre que si je quittais cette ville aussi tôt, c'était en grande partie à cause de personnes comme lui qui ne lâchent pas les touristes d'une semelle. En fait, j'ai trouvé la paix seulement dans la chambre de l'auberge où j'ai dormi, un endroit très agréable d'ailleurs, tenu par une famille d'Allemands : Le Djoliba. Quand même, malgré l'insistance des guides et vendeurs de toutes sortes, Ségou est une très belle ville qui vaut le détour !

samedi, avril 14, 2007

L'esprit des fêtes

Je ne sais pas pour vous, mais moi, quand arrivent les fêtes, je n'ai qu'une envie : m'encabaner, m'emmitoufler, faire du cocooning... Pourquoi je parle de ça maintenant, en plein mois d'avril ? Parce que, depuis mon retour du Mali, c'est l'état d'esprit dans lequel je me trouve. L'averse de neige toute récente y est peut-être pour quelque chose. Mais même quand j'étais au Mali, il m'est arrivé à quelques reprises de souhaiter une bonne averse de pluie qui m'obligerait à m'enfermer à la maison, devant un film ou un livre... Quand on est né au Québec et qu'on y a passé la majeure partie de sa vie, on est habitué à voir sa vie rythmée par les saisons. De -30 degrés Celsius à +30, notre vie s'organise autour de températures extrêmes... Ainsi, après avoir vécu plus de 6 mois dans des températures de 30 ou 40 degrés Celsius, j'ai l'impression que mon corps a besoin de ce ralentissement imposé par l'hiver aux gens du Nord, avant de se lancer à nouveau dans l'été...

jeudi, avril 12, 2007

Des photos de Sikasso

J'ai téléchargé sur mon compte Flickr les photos prises lors de mon très court voyage à Sikasso. Partie le jeudi matin, je suis arrivée là-bas vers 13h, puis je me suis installée au Centre St-Jean-Bosco, où on m'avait dit que je pourrais dormir pour pas trop cher. Effectivement, ça ne m'a coûté qu'un petit 6$CAN pour dormir là-bas. Mais j'étais seule dans ce grand centre aménagé pour accueillir des groupes... Le directeur m'a accueillie en me disant que dormir là toute seule me rendrait un peu nostalgique... et effectivement, c'était ennuyant à en pleurer ! Dès que j'ai eu posé mon sac, je me suis dit que je n'allais pas beaucoup durer là... Rapidement, je me suis rendue à la gare, question de connaître l'horaire des autobus en partance pour Ségou. J'étais décidée à partir rapidement. Ensuite, j'ai espéré trouver un centre d'information touristique, mais j'étais peut-être un peu naïve de penser que ça existait à Sikasso. Quand même, à Bamako, j'avais réussi à obtenir des dépliants touristiques auprès de l'OMATHO (Office Malien du Tourisme et de l'Hôtellerie). J'ai donc demandé au taximan de m'emmener là-bas. Erreur ! L'OMATHO de Sikasso est situé dans le governorat, interdit au public, ai-je appris plus tard. Pendant que je me balladais candidement dans le governorat, à la recherche des bureaux de l'OMATHO, les militaires à l'entrée du lieu ont vérifié les papiers du taximan. Sous prétexte qu'ils n'étaient pas en règle, sous prétexte que je n'avais pas le droit d'entrer là, ils ont essayé de me soutirer un peu d'argent. Pourtant, ces mêmes militaires m'avaient très bien vue entrer là-bas ! Pourquoi ne pas m'avoir plutôt empêché d'y entrer ? Quand j'ai demandé "Vous voulez quoi au juste ? De l'argent ?" et qu'ils m'ont dit, un petit sourire en coin, "exactement", j'ai éclaté. Je me suis fâchée, j'ai crié "C'est comme ça qu'on accueille les étrangers ici ?", et je suis partie sans me retourner. Cette petite aventure m'a vraiment mise en colère... et m'a convaincue que je ne devais pas m'éterniser à Sikasso !

Quand même, je n'allais tout de même pas quitter Sikasso sans même voir au moins l'une des attractions touristiques du coin. J'étais surtout intéressée par la plantation de thé Farako. Mais les chauffeurs de taxi (seul moyen de se rendre là-bas pour qui n'est pas équipé d'un 4x4), un peu trop gourmands à mon goût, me demandaient près de 40$ pour le voyage aller-retour. C'était trop pour moi, et j'ai préféré me rendre au grottes de Missirikoro, situées beaucoup plus près.

Ces grottes sont un lieu sacré où vivent depuis des années des marabouts qui n'en sont pas sortis, parfois depuis des années. On leur amène à manger et à boire, de l'eau pour se laver, et eux passent leurs journées à prier. Dans l'une des crevasses se trouve une mosquée et, étrangement, bien que je sois une femme, bien que je ne sois pas musulmane, on m'a laissée entrer dans la mosquée, où je me suis assise tranquillement pendant que les hommes présents sur place, dont le chauffeur de taxi, ont fait la prière de 16h...

J'ai passé deux bonnes heures à visiter les grottes, puis je suis revenue en ville, où j'ai grimpé... le Mamelon ! Eh ! bin oui, c'est ainsi que les Maliens ont nommé la seule colline de Sikasso... Dès le lendemain, 8h, j'étais à la gare de Sikasso, attendant le départ du bus vers Ségou...

mercredi, avril 11, 2007

Au Québec, il fait frette !

Avant même de revenir au Québec, je me doutais un peu qu'à mon retour, je serais devenue frileuse. Tout juste avant que je quitte Bamako, les températures oscillaient autour de 40 degrés Celsius, l'humidité montait en flèche, et je n'arrivais plus à me rafraîchir qu'en prenant de nombreuses douches chaque jour. En Beauce, actuellement, la température descend à peine sous le point de congélation... mais je suis frigorifiée ! J'avais oublié c'était comment de passer des journées entières sans transpirer... Si des chaleurs extrêmes sont parfois difficiles à supporter, elles ont au moins l'avantage de nous ralentir, de nous décrisper... Au contraire, le froid contracte les muscles, nous oblige à bouger plus vite... Sans aucun doute, la température a quelque chose à voir avec le rythme de vie différent des Canadiens et des Maliens...

Quand même, je dois l'avouer, en revenant au pays au mois d'avril, je ne m'attendais pas à avoir aussi froid. Dès que j'ai commencé à survoler le continent, dès que j'ai aperçu le sol néo-écossais, je me suis dit "Non, c'est pas possible, il y a toujours autant de neige ?" J'ai gardé l'espoir qu'au Québec, ce serait différent. Eh ! bin non. Le ciel sans nuage m'a permis de voir les champs enneigés, les rivières parfois toujours gelées... Franchement, avril au Québec, ce n'est pas le printemps. C'est toujours l'hiver !

mardi, avril 10, 2007

Le retour : les bons côtés

Après avoir passé une nuit blanche à faire de tristes aurevoirs (des adieux?), après avoir passé une nuit blanche à survoler le ciel africain, après avoir attendu huit heures dans une salle d'embarquement de l'aéroport de Casablanca, après avoir volé huit autres heures au-dessus de l'Atlantique, j'étais contente de rouler jusqu'en Beauce dans une voiture récente, propre, dans une circulation fluide et disciplinée, sur des routes en bon état.

Après six mois de douches froides, de douches parfois prises dans un seau parce qu'on nous avait coupé l'eau, j'étais contente de prendre une bonne douche chaude.

Après avoir dormi pendant six mois sans drap, parfois dans des températures extrêmes, sous un ventilo qui ne servait à rien sinon à secouer un peu l'air chaud, j'étais heureuse de passer la nuit bien emmitouflée sous des épaisseurs de chaudes couvertures.

Après avoir avalé pendant six mois des plats toujours trop huileux, je suis contente de pouvoir recommencer à bien manger, à manger santé.

Après avoir vécu six mois dans un appartement mal équipé, sans télévsion, sans Internet, j'apprécie pouvoir m'asseoir tranquillement devant la télé, j'apprécie le choix incroyable de canaux, j'apprécie pouvoir utiliser Internet quand je le veux.

Après avoir passé la majorité de mes temps libres avec des personnes peu scolarisées, peu informées, peu enthousiastes, peu motivées, c'était bien d'entendre, dans le vol Casablanca-Montréal, des gens discuter de façon dynamique d'une tonne de sujets.

Par contre, je dois l'avouer, le retour n'a pas que de bons côtés. J'ai l'impression que l'Afrique me cache encore beaucoup de choses, j'ai l'impression que j'ai encore beaucoup à découvrir du continent africain... Ainsi, je ne suis pas blasée, loin de là, et c'est avec un peu de difficultés que j'observe et essaie d'accepter la distance qu'il y a maintenant entre moi et le Mali... Ma routine malienne me manque, l'impression de vivre dans la découverte continuelle me manque...

NB Quand je parle, dans mon message, de personnes peu scolarisées, peu informées, peu enthousiastes et peu motivées, je ne parle pas des Maliens en général, mais plutôt de certaines personnes du quartier où j'habitais, un quartier plutôt populaire, et plutôt pauvre... Car bien sûr qu'il y a, au Mali comme partout ailleurs, des personnes très scolarisées, très motivées, etc. Mais de façon générale, quand je rentrais le soir à la maison et que j'allais causer avec les gens du voisinage, je m'amusais beaucoup, mais j'étais très rarement stimulée intellectuellement...

dimanche, avril 08, 2007

Toute bonne chose a une fin !

Je suis arrivée à Montréal vendredi soir. Aujourd'hui, jour de Pâques, je profite d'une journée avec la famille. Mais au cours des prochains jours, je raconterai avec plus de détails mes dernières aventures au Mali, ainsi que mes impressions du Canada, après avoir passé près de 6 mois au Mali...

mardi, avril 03, 2007

Le veuvage

A Tombouctou, j’ai logé dans une famille où la maman était en veuvage. Son mari est mort il y a 4 mois, et les musulmanes qui perdent leur mari doivent ainsi faire le veuvage pendant 4 mois et 10 jours. La dame m’a expliqué qu’à l’époque du prophète Mahomet, une femme ayant perdu son mari était si contente qu’elle a crié sa joie sur tous les toits. Pour la punir, le prophète a exigé qu’on l’enferme pendant 4 mois et 10 jours. C’est pourquoi les musulmanes récemment veuves doivent rester à la maison sans sortir, sans ne voir aucun homme, pendant 4 mois. Tout le temps où je suis restée là-bas, la femme n’a bougé que de sa chambre à la cour, et la nuit uniquement, pour éviter qu’un homme qui n’est pas son enfant la voit. Comme toujours, ces espèces d’exigences imposées aux femmes par la religion musulmane ne sont pas imposées aux hommes. Ainsi, un musulman qui perd sa femme peut se remarier dès le lendemain s’il le veut.

De même, toujours à Tombouctou, je suis allée visiter une femme qui venait de se marier, et celle-ci devait rester isolée, comme la veuve, pendant 3 jours consécutifs. Encore une fois, ce genre d’exigence n’est pas imposé aux hommes. Cette inégalité persistante dans la religion musulmane pique un peu la féministe en moi, je dois l’avouer… Souvent, la religion musulmane traite les femmes, il me semble, comme des enfants. Même si j’essaie de rester ouverte pour bien comprendre la culture d’autrui, il y a de ce genre de choses qui continuent de me choquer, même après 6 mois au Mali…

lundi, avril 02, 2007

Une nuit chez les Touaregs

Je suis maintenant de retour à Bamako, il ne me reste plus que 3 jours à passer au Mali, je rentre au Canada le 6 avril. J’espère donc profiter au maximum des derniers jours qu’il me reste à passer ici. Malgré tout, je l’ai dit, il y a beaucoup à dire de mon séjour à Tombouctou. L’expérience sans doute la plus intéressante que j’ai vécue là-bas est la nuit que j’ai passée dans une famille de Touaregs. Ces gens m’ont toujours fascinée. Comment peut-on vivre ainsi dans le désert, sans eau, sans rien ? Et puis la vie de nomades aussi me fascine. Bref, je suis allée passer une nuit dans une famille de Touaregs. A première vue, ma petite nuit désertique ressemblait pas mal à une mise en scène pour touristes, avec la balade à dos de dromadaires et tout et tout. En passant, se promener à dos de dromadaire, c’est tout sauf confortable ! Et puis ça marche pas vite, ces bêtes-là !

Mais une fois sur place, il n’y avait plus de mise en scène du tout. Même que je me suis un peu demandée ce que je faisais là ! On a posé une natte par terre sur le sable, je me suis assise, et puis bon... La famille s’est assise près de moi, ils ont discuté en tamasheq (une langue dont je ne connais pas un traître mot), et de temps en temps, le chef de famille venu me chercher à Tombouctou me demandait si tout allait bien… Bref, je n’ai rien fait là-bas sinon observer la famille. Je me sentais un peu mal à l’aise, je dois l’avouer. Je me disais "j'arrive ici, je ne sais même pas comment saluer ces gens dans leur propre langue, et je les observe comme si j'étais dans un zoo..." Quand même, je n’ai pas cessé de me répéter à quel point ces gens-là mènent une vie tellement, mais tellement différente de ce à quoi je suis habituée ! En comparaison, la vie à Bamako m’est apparue soudainement très familière ! C’est pour dire !

A part le chef de famille, j’ai discuté un peu avec un petit garçon d’une dizaine d’années. « Discuter », c’est beaucoup dire. Il m’a surtout demandé d’écrire pour lui les chiffres de 1 à 10. Ainsi, j’ai réalisé que ces enfants-là, non seulement ils ne vont pas à l’école, mais ils ne savent même pas compter ! Les seuls chiffres que le petit connaissait, ce sont les chiffres que sa maman lui a montrés. Celle-ci m’a expliqué qu’elle était allée, étant petite, dans une école pour Touaregs qu’on avait installée dans le désert. Mais maintenant, la seule école se trouve à Tombouctou et la famille n’a pas les moyens de payer le matériel scolaire. Donc aucun des enfants de la famille ne va à l’école. Toute la journée, ils s’occupent des animaux, les chèvres, les vaches, les moutons et les dromadaires. Les filles font la cuisine. Essentiellement, ils mangent du riz et de la viande. Ils ne boivent presque pas d’eau. Quand j’ai offert un peu d’eau au Touareg venu me chercher à Tombouctou, il m’a dit « Non merci ! » en m’expliquant que les nomades avaient l’habitude de boire très peu…

Bref, j’ai passé la nuit sur ma natte, j’ai dormi sous les étoiles, et le lendemain, le Touareg m’a fait faire le tour du terrain près de sa maison (un genre de tente de paille). Tout autour, il y avait des familles d’éparpillées comme ça dans le désert. Le monsieur m’a expliqué que, quelques fois par année, ils se déplacent, quand il n’y a plus rien à manger pour les animaux là où ils se trouvent. C’est la raison d’ailleurs pour laquelle leurs maisons sont très sommaires. Ce qui m’a surprise le plus, je pense, c’est qu’ils réussissent à vivre presque sans eau. Comme je l’ai dit, ils boivent très peu, ils cuisinent avec un minimum d’eau, ils se lavent de façon sommaire… j’ai l’impression qu’en fait, dans plusieurs circonstances, le sable remplace l’eau, notamment pour nettoyer la vaisselle. D’ailleurs, à Tombouctou, on parle du sable comme d'un épice supplémentaire dans la nourriture. Parce que c'est inévitable, il y a toujours un peu de sable qui se mélange aux plats.

Mais pour en revenir aux Touaregs, je dois le dire, je continue d’être fascinée par ce peuple. Toute la nuit je me suis dit "Mais c'est pas croyable, c'est pas croyable..." Du Canada au Mali, les habitudes de vie peuvent être tellement différentes ! Comme quoi l'être humain sait s'adapter à son environnement d'une façon assez incroyable !!