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mercredi, novembre 15, 2006

Être malade au Mali : la suite

On m'avait dit déjà que, dans nombre de pays africains, la façon dont on traite un malade est tout-à-fait différente de ce à quoi on est habitué au Canada. Au Canada, quand je suis malade, je cherche la tranquilité d'abord, le calme, la solitude. J'essaie de dormir le plus possible, question de bien récupérer, et je limite mes contacts au minimum.

Au Mali, au contraire, la maladie est fortement associée à la mort. C'est du moins ma façon d'interpréter les choses. Et ça se comprend un peu, quand on sait que l'espérance de vie n'est ici que de 56 ans environ. Ca se comprend également quand on connaît un peu les hôpitaux et les soins disponibles ici. Ainsi, du moment où une personne est malade au Mali, l'idée que peut-être la mort est proche finit souvent par lui trotter dans la tête. Les Maliens agissent donc avec les malades comme on agit au Canada avec les personnes agonisantes. Pour un Malien, une personne qui souffre doit être entourée. Elle doit également éviter de dormir, autant que possible, car le sommeil est un premier pas vers la mort.

C'est du moins ce que j'ai cru comprendre, dimanche dernier, alors que j'ai dû gérer les allées et venues des voisins et des connaissances venus prendre des nouvelles de Nathalie. La plupart n'étaient pas satisfaits d'entendre "Voilà, elle a pris des médicaments, maintenant elle dort, elle va de mieux en mieux, il ne faut pas s'inquiéter, elle se repose, elle ira mieux..." La plupart ont insisté pour la voir. L'un d'eux m'a suggéré de la réveiller et de la forcer à manger, même si elle vomissait tout ce qu'elle essayait d'avaler. Lundi matin, notre gardien David a même tardé à partir, espérant d'abord voir Nathalie. Quand je lui ai dit "Bon, elle va beaucoup mieux, elle va restée coucher pour la matinée, mais elle pourra aller travailler dans l'après-midi", il m'a répondu "Bon, ok, c'est bon, mais j'aurais quand même aimé la voir avant de partir"...

Pour la Canadienne que je suis, cette exigence à voir la malade à tout prix m'a mise, toute la journée, dans des situations un peu embarrassantes. Quoi faire quand, d'un côté, la malade demande qu'on la laisse tranquille et que, de l'autre côté, les visiteurs insistent pour la voir ? Si j'essaie la plupart du temps de m'adapter aux façons de faire maliennes, dans ce dernier cas, j'ai préféré agir comme j'aimerais qu'on agisse avec moi, et j'ai laissé Nathalie dormir malgré l'insistance des visiteurs...