De la poussière et des gens
Récemment, Nathalie et moi discutions tranquillement avec David et un voisin. Quand ce dernier m’a demandé ce que j’aimais le moins de l’Afrique, spontanément, j’ai répondu “la poussière”. La poussière, au Mali, est partout. Bamako est la capitale du pays et pourtant, la plupart des rues de la ville ne sont pas goudronnées. Même les rues qui le sont ne sont pas bordées de beaux trottoirs de béton. Elles sont plutôt bordées de trottoirs de terre. Quand les femmes balaient avec leur petit balai fait de bouts de paille, j’ai souvent l’impression qu’elles soulèvent la poussière davantage qu’elles la poussent. Comme la pluie est très rare dans la région, alors que le Sahara est tout près, la verdure aussi est rare. Là où l’on trouverait, au Canada, de beaux terrains couverts de gazon et de fleurs, on retrouve, à Bamako, du sable au travers duquel pousse, de peine et de misère, quelques arbustes. Au bout du compte, l’air même de Bamako est saturé de poussière. Ainsi, même si le rhume que j’ai attrapé à mon arrivée ici est guéri depuis longtemps, j’éternue fréquemment, le nez rempli de poussière. Quand j’arrive au centre-ville, mes yeux remplis de poussière se mettent à piquer. Quand j’ose me balader en sandales, c’est sur mes pieds que se retrouve la poussière. Et quand je transpire le moindrement, ce qui arrive fréquemment compte tenu de la chaleur ici, la poussière colle à ma peau et à mes vêtements. Tous mes souliers sont d’ailleurs recouverts d’une mince couche de poussière rouge, puisque la terre malienne est rouge, et non pas brune comme au Canada. À l’appartement, on réussit avec difficulté à garder le plancher propre. Et même si on gère assez bien les allées et venues, même si on ne se promène jamais en souliers dans la maison, il faut nettoyer le plancher toutes les semaines. Chaque fois que je nettoie les rares meubles de la maison, c’est toujours une épaisse couche de poussière qui se retrouve sur ma guénille. Au bout du compte, il est difficile, je trouve, de se sentir complètement frais et propre dans un pays où la poussière est ainsi omniprésente…
Le même voisin m’a demandé ensuite ce que j’aimais le plus de l’Afrique. Spontanément, j’ai répondu “les gens”. À Bamako, il y a des gens partout, tout le temps. Les boutiques et les petits commerces sont tous situés de chaque côté des rues, et chacun travaille à l’extérieur, comme il fait toujours beau. Le couturier, le mécanien, l’épicier, la cuisinière, le pharmacien, l’ébéniste, le forgeron : tous ces gens qui possèdent de petits commerces travaillent généralement dehors, sur le trottoir. Quand je suis sortie vendredi soir dernier, j’ai pu constater, à mon retour, que même la nuit, des gens dormaient sur le trottoir, des gardiens notamment, bien cachés sous leur moustiquaire. Ainsi, quand on circule en ville, on voit des gens partout.
Et peu à peu, je deviens une habituée de certaines artères. Peu à peu, j’apprends à connaître la vendeuse de bananes, la vendeuse de cacahuètes, l’épicier ou le photographe. Peu à peu, les occasions de saluer l’un ou l’autre en revenant du travail augmentent. Et au Mali, les gens semblent prendre plaisir à fraterniser. Il est d’ailleurs normal, ici, de prendre plusieurs minutes, chaque matin en arrivant au travail, pour saluer chacun et chacune : “Bonjour, ça va ?
-Ça va, et toi, ça va ?
-Ça va…
-Ah bon… Alors ça va ?
-Ça va… Et la soirée, c’était comment ?
-Ah, ça va, ça va… Et la santé ?
-Ça va… Et la famille ?
-Ça va, ça va… Et les enfants ?
-Ça va…”
Et je ne caricature pas ! Il est très fréquent que, dans une même conversation, on me demande au moins 3 fois comment je vais ! Il m’arrive parfois d’être un peu pressée de me mettre au travail le matin. Mais de façon générale, j’apprécie que les gens de mon entourage s’intéressent à moi et prennent le temps de me saluer. Ainsi, dans un pays comme le Mali, et c’était vrai également quand j’étais au Burkina, on se sent presque jamais seul. Quand, le soir, je me retrouve à la maison, je n’ai qu’à sortir ma chaise dehors, près de la rue, pour que des enfants des environs ou des voisins viennent s’asseoir et discuter un peu avec moi. Et contrairement à ce que chante Lynda Lemay dans sa chanson “Maudite visite!”, la visite, ici, n’est pas un fardeau. Comme les gens ont l’habitude de travailler à l’extérieur, la présence d’un visiteur ne les empêche pas de vacquer à leur occupation et de travailler. Il suffit d’offrir un peu d’eau à boire, et tout le monde sera content, sans rien demander de plus. Quand j’ai quitté le Burkina, c’est d’ailleurs l’omniprésence des gens partout autour de moi qui m’a le plus manqué. Et je sais déjà que c’est ce qui me manquera le plus du Mali…
C'est drôle comme la vie est différente chez nous.C'est vrai que ca va te faire un vide énorme car la visite chez nous on l'invite où bien on téléphone avant de passer Ha!Ha!
Bonne Journée!
Nathaliexx