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lundi, novembre 27, 2006

L’excision

J’étais à une réunion récemment où un médecin expliquait que 90% des femmes maliennes étaient excisées. Le hasard a fait que le sujet s’est glissé à nouveau dans l’une de mes discussions avec notre gardien David. En fait, le sujet ne s’est pas seulement glissé dans la conversation : il m’est sauté au visage, comme une mauvaise surprise. J’étais d’abord surprise qu’un Malien aborde si facilement avec moi ce sujet à priori tabou. Surprise également des arguments qu’il m’a avancé pour défendre la pratique de l’excision. Surprise enfin de ne pas avoir été capable de pousser la conservation, trop touchée que j’étais. Alors que j’aime bien creuser les sujets, poser des questions, cette fois, je me suis tue. Le sujet m’a en effet donné froid dans le dos. Mais il m’a au moins permis de mieux prendre conscience de la profondeur du fossé parfois creusé par les différences culturelles… En surfant un peu sur Internet, j’ai constaté que le sujet est revenu également dans l’actualité récemment, quand Michaëlle Jean s’est adressée aux députés maliens à l’Assemblée nationale. On dit que ça a créé un froid au sein de l’assemblée...

En fait, j’ai parlé d’excision avec David au même moment où il m’a parlé de la dame d’à côté qui s’était fait battre. En comparant les habitudes au Mali (où il est plus ou moins normal pour un homme de battre une femme) et celles au Canada (où il est inacceptable pour un homme de battre sa femme), David m’a dit qu’il y avait certaines traditions comme celles-là que les blancs n’arrivaient pas à comprendre. C’est à ce moment qu’il m’a parlé d’un projet sur lequel le CECI a travaillé déjà (David a été gardien, dans le passé, pour le CECI) et qui visait à lutter contre l’excision, qu’on appelle également “mutilation génitale féminine”.

L’excision, en fait, c’est quoi ? Les Maliens la comparent parfois à la circoncision. En fait, exciser une fille, c’est couper son clitoris pour le rendre insensible, et c’est parfois aussi coudre ses petites lèvres. Dans les cas extrêmes, on va tout couper, pour ne laisser, au bout du compte, tout juste un peu d’espace pour les menstruations et les relations sexuelles. Je résume grossièrement, il faut m’en excuser, je ne suis pas une spécialiste de la question, loin de là.

Traditionnellement, l’excision, comme la circonsion, sont pratiquées sur des enfants ou des adolescents, en groupe. Le tout est fait à froid, sans anesthésie. Au Mali, ces pratiques sont parfois considérées comme des rites de passage. L’enfant circonsis ou excisé doit faire preuve de courage, et plus il sait résister à la douleur, sans crier, sans pleurer, plus on dira de lui ou d’elle qu’il est courageux. D’ailleurs, selon David, un garçon qui n’est pas encore circonsis passé un certain âge risque d'être ridiculisé par ses camarades. Pour un Malien ou une Malienne, la circoncision et l’excision contribuent ainsi à son honneur.

Désormais, le tout est fait de façon un peu plus cachée, puisque de plus en plus d’ONG et d’organisations internationales essaient de convaincre les Maliens que l’excision, c’est mal. Ce qui fait que l’excision choque les idées occidentales davantage que la circoncision, c’est peut-être parce qu’il s’agit d’un moyen parmi d’autres pour les hommes d’exercer un contrôle sur les femmes. En effet, David m’a expliqué qu’on disait d’une femme non excisée qu’elle était trop amoureuse. “Mais, j’ai dit, qu’est-ce qu’il y a de mal à être trop amoureuse?
-Bien, m’a dit David, une femme trop amoureuse ne se contentera pas de son mari. Elle voudra aller voir ailleurs.” Autrement dit, une femme trop amoureuse, c’est une femme chaude qui risque de tromper son mari. L’excision, en ce sens, est une façon pour les hommes de contrôler un peu plus les femmes.

Cependant, là où ça devient compliqué, c’est quand on sait que l’excision, en fait, est effectuée par les femmes elles-mêmes, souvent sous la pression des grand-mamans des petites filles. Sous cette pression, il y a tout le poids de la tradition... Mais sous le poids de la tradition, il y a quoi ?...

1 Commentaires:

  • Et bien, j'ai justement écouté un reportage hier en Afrique, on commence a sensibilisé ces dames qui pratiquent les excisions et dans un pays ou j'oublie le nom depuis 4 ans l'excision ne se pratique plus.Justement parce qu'on réussi a démontré le danger de cette intervention suite a la mort de certaine petite fille sous les yeux meme de celles qui la pratique.
    Avant d'en etre informée par une prof. la dame croyait que lorsque les jeunes filles mouraient pendant l'intervention et souvent parce qu'elle perde trop de sang qu'il s'agissait de mauvais esprits.
    Donc tu vois que c'est au dela des cultures parfois.
    Bonne journée Fantaxxxxxxxx

    Par Anonymous Anonyme, le lundi, 27 novembre, 2006  

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